Les Risques et les Espérances de la Prospective
Aujourd'hui
Compte-rendu du Café Phïlo. du 15 décembre
2002.
EXPOSE DE MONSIEUR JEAN LESAGE:
S'il est vrai, comme
d'aucuns le pensent, que nous sommes au début de l'humanité, il faut, selon la
formule d'Elwin Tofler, être optimiste à long terme même si les étapes sont
tumultueuses.
Définition
de la prospective : C'est
la science qui étudie l'évolution des sciences, des techniques, et plus
généralement de tout ce qui est à la base des changements du monde contemporain
ainsi que les conséquences de ces changement dans un avenir proche.
Le changement :
Le futur a de l'avenir
mais quel est l'avenir du-futur? L'incertitude, dans une certaine mesure; crée
le rêve, or, le rêve crée l'avenir.
Hier, les Etats étaient
des nations ; aujourd'hui ils sont des réseaux. Hier, la société était
industrielle ; aujourd'hui elle est informationnelle. Hier, la société était à
structure pyramidale (retranscription du modèle de l'armée, elle-même
retranscription du modèle de l'église, ellemême retranscription du modèle de
l'Empire romain) ; aujourd'hui l'Empire romain s'écroule une dernière fois avec
l'apparition de la société à structure polynucléaire en réseau. Le modèle de
structure polynucléaire s'applique à l'Europe, aux Entreprises actuelles, aux
Etats fédéraux et surtout aux Etats confédérés.
Il faut acquérir la pensée complexe, notamment
pratiquer la sémantique générale, pour apprécier et apprendre à gérer les changements.
La sémantique générale est difficile d'accès â l'esprit français en raison de
sa forte culture cartésienne.
Définition de la sénaantique
générale : C'est
la connaissance de la connaissance, I'analyse de la connaissance. Par exemple,
c'est comprendre que nos yeux ne voient rien au sens strict car c'est le
cerveau qui construit, grâce au fonctionnement d'une série d'organes, une
image. Ce type d'analyse peut s'appliquer à tout ce qui arrive à l'être humain
puisque toute sa perception résulte de son cerveau, ainsi un même événement est
apprécié avec autant de différences qu' il y a d'individus. En effet, nos
relations se passent dans notre tête un peu à la manière d'une représentation
théâtrale, le décor étant constitué par notre idée de l'espace et du temps.
La notion d' espace :
• Jusqu'à Ptolémée, on pensait que la Terre
était plate (début du Moyen Age).
•
Jusqu'à Copernic, on pensait que le
soleil tournait autour de la Terre (début de la Renaissance).
• Aujourd'hui,
nous pensons qu'il y a environ 350 millions de planètes dans notre galaxie et
qu'il y a plusieurs centaines de millions de galaxies dans notre cosmos.
D'autres pensent que l'essentiel n'est pas perçu
par les yeux mais par le coeur.
La notion de temps :
Au regard de la pendule cosmique, notre histoire
est très récente et il resterait 5 millions d'années à la Terre.
Prospective :
« l'avenir n'est plus ce
qu'il était » ; « il faut construire auiourd' hui ce que l' avenir sera »
La prospective constitue une réflexion pour
éclairer la situation présente aux fins d'appréhender les futurs possibles.
Plus précisément la prospective permet de construire aujourd'hui dans sa tête
ce que sera le futur.
La sémantique générale
conserve une grande place au hasard. En effet, trop de facteurs persistent à
échapper à la connaissance, et, de surcroît, en vertu du principe de globalité,
les comportements de chaque élément tant humain que matériel se répercutent sur
l' ensemble du système.
DEBAT :
•:• Précision terminologique :
Il ne faut pas confondre la sémantique générale de la sémantique, cette dernière fait partie de science linguistique. Dans son aspect linguistique, la sémantique générale étudierait plutôt les relations entre l'homme, le réel et son langage.
Les nations voisines mais
distinctes de la sémantique générale:
• La sémantique générale se distingue de
l'épistémologie, c'est à dire de la partie de la philosophie qui étudie
l'histoire, les méthodes et les principes des sciences, dans la mesure où cette
dernière est plus théorique alors que la sémantique générale est plus pratique.
• La sémantique générale se
distingue de la méthodologie de l'action caractérisée par l'application de
l'adage « gouverner, c'est prévoir ».
• La sémantique générale se distingue de la philosophie de l'histoire prônant « le changement pour le changement » alors que l' individu reste attaché à son patrimoine naturel d'où sa hantise des marées noires.
• La sémantique
générale se distingue de l'innovation et a fortiori de la novation: s' il est
important de faire des progrès, ceux-ci ne doivent pas entraîner nécessairement
une destruction de l'existant.
•:• Quelques domaines d'application de sémantique générale :
11 n'y aura pas de véritable
progrès si nous continuons à faire toujours les choses de la même façon. Il
faut du changement et accepter le changement. La sémantique générale permets
d'appréhender les problèmes sous un autre angle, et conséquemment d'envisager
des solutions inédites. Ainsi, les consultants en Entreprise, â la lumière des
méthodes de sémantique générale, essayent de constituer une carte de
l'Entreprise.
La sémantique générale
permet d'appréhender notamment les problèmes essentiels suivants : ceux
existants, ceux du risque et ceux liés aux espérances.
• Problèmes
essentiels existants :
Exemples. sauver la
démocratie - les écarts d'espérance de vie d'un peuple par rapport à un autre -
le niveau de pauvreté,.:.
Peut-on sauver la
démocratie au détriment des peuples tels que l'Irak ou de plusieurs pays
africains,.. ? Mais en l'occurrence la sauvegarde de la démocratie est-elle la
véritable motivation ? Enfin, la sémantique générale ne permettrait-elle pas de
concevoir un autre système que la démocratie dans la mesure où cette dernière
est tellement dénaturée ?
• Problèmes
essentiels du risque :
Exemples: augmentation du
nombre des malades du SIDA - disparition des espèces animales ou plus
généralement tous les risques écologiques qu'encourre la « Terre , ce colosse
aux pieds d'argile », ...
Le doute peut être
destructeur ou producteur c'est pourquoi ü faut constamment vérifier la
justesse des cartes.
• Problèmes
essentiels liés aux espérances :
Les difficultés d'espérance peuvent être perçues
différemment selon les 3 niveaux suivants : l'individu, la société et la
planète.
- Les espérances liées
â l'individu: augmentation considérable de l'espérance de vie
puisque les centenaires sont de plus en plus nombreux - amélioration du niveau
de vie - ralentissement du boom démographique,...
Il est important
d'élaborer la notion de citoyenneté terrienne car il est essentiel de se
construire pour construire le monde et réciproquement.
- Les espérances liées â la société : construire
une Europe politique - remettre l'homme, et non plus I'argent, au centre de la
société - développer les valeurs telles que liberté, égalité et fraternité -
développer l'oecuménisme et la tolérance entre les religions,...
- Les espérances liées â la planète: développer
les énergies renouvelables - construire des satellites pour veiller et protéger
la Terre - connaître le cosmos et découvrir si nous sommes seuls dans l'Univers
- agir sur tous les décisionnels afin de permettre le développement durable
c'est-à-dire qui ma pas de conséquences négatives
SYNTHESE
:
Qu'est-ce que la prospective ? C'est l'art de prévoir les
évènements. Mais est-ce possible ? Est-il possible pour la science, pour
l'histoire, pour la philosophie de prévoir les évènements ? Qui pouvait prévoir
que le Mur de Berlin allait tomber ? Qui pouvait prévoir que Gândhï ferait
tomber l'empire britannique sans un coup de fusil. Les prévisions de Marx
étaient erronées car c'est le communisme qui a disparu. Gardons à l'esprit que
le changement n'est pas synonyme de progrès car il peut y avoir changement sans
progrès.
Selon le livre de l'Ecclésiaste « Rien de nouveau sous le soleil ». Ainsi, de
tout temps l'homme prétend aspirer à la paix mais est-ce que l'homme désire
réellement la paix'? Puisque les hommes ne savent pas ce que c'est que la paix,
il ne peuvent pas vouloir la paix. A ce titre, le Général de Gaulle disait que
« la guerre est une loi de la nature, et la nature a horreur que l'on
transgresse ses lois ».
Raymond Aaron : les hommes ne font pas l'histoire car ils ne savent pas
l'histoire qu'ils font ». Emmanuel Todd, dans « La fin de l'empire », prédit la
chute de l'empire américain.